Capteur, attrapeur, moissonneur, picoreur, butineur, récupérateur, cueilleur, voltigeur, à l’occasion chapardeur ou grappilleur, soustracteur et intercepteur, Nikola Kapetanovic est un artiste plasticien troublant. Tout ce qu’il fait, il le « pompe » sur internet. De sorte qu’immédiatement se pose le statut de ses «emprunts».
Nikola Kapetanovic est-il de droit l’auteur de ses oeuvres ?
Constitué de peintures et de dessins de toutes tailles directement inspirés de ses « prélèvements », son travail présente quelles qu’en soient les analogies, des divergences et des écarts caractéristiques de récupérations sélectives. D’une production à l’autre, ses reprises déclinent des appropriations sensibles davantage que des réinterprétations. L’ensemble incline vers l’imagination.
Essentiellement d’origine photographique, et bien qu’alimenté par les images d’amateurs déposées publiées à tout propos et à tout vent sur la toile, l’humus de son travail incarne un corpus auquel le livre ou la banques d’images confère du sens. Ses sujets d’inspiration, loin d’être originaux et surprenants, procèdent ainsi d’un parcours et d’une documentation de tout ce que charrie Internet, le meilleur y côtoyant le pire. Jusqu’à révéler des frontières suspectes et des détails qu’en artiste sensible à l’allusif, il se plaît à rendre importants.
Et ce ne sont qu’images plus mal cadrées et imprécises les unes que les autres, ou plus communes et le plus intimes possibles qui défilent impudiquement sous son regard et le nôtre, donnant à chaque présentation plus qu’un air de déjà-vu, un écho cynique et désabusé sur un monde sans imagination. Mais Kapetanovic les regarde comme des images libérées et dont il semble chercher à retourner la banalité.
Il ne faut donc pas déduire qu’aucun travail plastique ne soit imaginable depuis ces images grossières. Pour Kapetanovic, c‘est même le contraire. S’il n’est pas le premier auteur de ses modèles, il n’en agit pas moins en créateur engagé. Les parties floues ou les coupures intempestives des images où il puise ses objets de travail, leurs mises en scènes conventionnelles ou répétitives, leurs focales improvisées, souvent inconvenantes, réinvestissent des tendances et des objectifs que le Pop Art visait en partie avec l’utilisation des clichés de la presse magazine. A sa façon, Kapetanovic joue plastiquement avec autant de perspectives que d’entrevues, jaugeant peut-être la réalité visuelle à l’aune d’enregistrements impromptus.
Au risque de faire trembler le spectateur redevenu regardeur.
Ces images ont aussi la même fonction que des croquis saisis sur le vif. Le pur moment de vie auquel elles prétendent est, à l’instar de leur fragilité formelle, l’occasion de retourner une littéralité narrative quelquefois insistante. Les oeuvres de Kapetanovic ne sont pas des vues repeintes ou redessinées, mais réappropriées, et presque à la lettre revues. Initialement descriptives, elles semblent après coût poétiques.
Qu’elles soient « d’origine contrôlée » ou qu’elles aient été déposées-publiées sur le net par des inconnus de passage, les images rustiques qu’utilise Nikola Kapetanovic et in fine les peintures et les dessins qu’il en tire apparaissent de son cru. Plus que l’origine et le style, il en a défini l’éthique. Après avoir été captées, elles sont devenues les siennes par la grâce d’une appropriation, de retournements et d’une redéfinition plastiques clairement revendiquées. Son travail de créateur est signé.
Alain Bouaziz, 2011
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